la chute du Mur, papa
Je m'adresse à mon père qui est parti en 1988.
1 an après il y eut la chute du Mur de Berlin.
Mon père, de ses 5 longues années de prisonnier en Allemagne, n'oublia jamais les mines de sel où il fut envoyé, mais il n'oublia pas non plus la famille dans laquelle il fut envoyé pour y travailler, alors que le chef de famille et le fils étaient partis se battre.
Pendant de longues années, le fils de la maison, Eugène, entretint une correspondance avec mon père d'abord, puis à son décès, avec moi qui prit la relève.
La chute du Mur, papa
La chute du mur papa, c'était il y a trente ans,
tu n'a pas connu, tu es parti un an avant,
mais t'aurais été content d'avoir connu ça
savoir qu'ils étaient enfin réunis tous les trois.
Tous les 3, c'était Eugène, Guitty et Marie la petite dernière,
c'est Elle que le malheur mit derrière les barbelés,
Elle, la petite Marie, fleur fragile et de faible santé,
qui dût et sut se forger une force d'enfer,
et d'endurance.
T'en parlais souvent du Mur, tu pouvais pas te douter
qu'il tomberait un jour, réunissant ainsi les deux côtés,
toi qui les a connu 5 années pendant la dernière guerre,
tu les a vu se déchirer de chaque côté du rideau de fer
Tu nous en parlais souvent, évoquant cette souffrance
quand une fois l'an Marie franchissait cette barrière,
c'était alors des larmes de joies mêlées de tristesse
tous savaient aujourd'hui, qu'elle repartirait demain, à l' EST.
Ils le savaient, mais ils savouraient encore et encore
le bonheur d'être ensemble malgré la guerre qui gronde
ils en oubliaient pendant quelques instant les miradors.
Eugène l'aîné, Marie la brune et Guitty la blonde.
Quand le Mur est tombé, papa, ils ont peut être chanté, dansé
crié, pleuré, tombés à genoux, remerciant le ciel ou Dieu le Père,
peut être aussi les ont -ils aidé même, à le démolir pierre par pierre
ou bien, bras dessus, bras dessous ils ont dit « Viens il est grand temps de rentrer ».
Voilà, Papa, aujourd'hui on fête la chute du Mur et les gens rient
face au Mirador, il y a quelqu'un, les yeux remplis de pluie,
ce quelqu'un, papa, c'est Elle trente ans après, c'est Marie,
elle essuie ses larmes d'un revers de main,
ici, il y avait hier un mur à Berlin.
Elle écoute la musique qui a fait place aux tirs, et c'est un vrai miracle
quand le violoncelle de Gautier Capuçon égrène une suite de Bach.
NOVEMBRE 2019
Texte de Marina, pour ne pas oublier. N'oubliez pas votre commentaire, merci.